En ce mois de mars 2021, l’AFF fête ses 30 ans. Trente ans à accompagner la progression d’un métier, de plus en plus stratégique, de plus en plus connecté aux enjeux globaux de développement associatif. Trente ans de diversification des secteurs appelant à la générosité, des « french doctors » à l’enseignement supérieur, de la culture aux collectivités territoriales, et trente ans de développement d’outils associés, du fax de collecte d’urgence, aux réseaux sociaux, microdons et cagnottes. Trente ans enfin à suivre l’évolution de la société française pour créer de la mobilisation. Seuls quelques-uns d’entre vous, artisans de sa création pour la plupart, ont toutes les clés de ces 30 ans. Alors si vous avez loupé les épisodes précédents, plongez-vous dans cette petite histoire. La vôtre.

L’Association Française des Fundraisers… c’est d’abord une histoire d’écrits. Car les fundraisers se structurent d’abord, à partir de 1986, autour d’un magazine dédié à la collecte de fonds : « La Voie Privée ». A cette époque, le fundraising (ie le marketing direct appliqué à l’appel à la générosité) est arrivé depuis la fin des années 70 en France. Importé des USA, il est en train de prendre son essor. En 1986 justement, les Restos du Cœur lancent leur chanson sur les ondes. La même année, Médecins Sans Frontières est à l’origine de la première grande campagne de pub associative. En 1987, l’AFM importe le Téléthon en France… Après avoir été une activité un peu éparse, en cette fin des années 80, le fundraising est en train de devenir pleinement un métier : les départements d’appel à la générosité du public se sont structurés dans les ONG, des agences de fundraising ont poussé.

Sur ces bases, au début des années 90, s’ouvre une sorte d’âge d’or du fundraising. Les montants donnés explosent, la France n’a jamais semblé si généreuse, incitée notamment par les échos médiatiques des crises internationales. Le fundraising occupe une place de plus en plus stratégique dans les associations et fondations. Mais subit aussi un regard critique : un « mal nécessaire » que ces professionnels du marketing direct immergés au cœur d’organismes faits de bénévolat et de militantisme. C’est alors, en 1991, autour d’un verre selon la légende (on ne refait pas son ADN) que se crée le « Club des Fund-Raisers », association qui a pour but de réunir les professionnels du métier et de leur permettre d’échanger sur leurs pratiques. En termes techniques, mais aussi en termes éthiques.

Car au milieu des années 90, les questions déontologiques occupent le devant de la scène. En 1996, Jacques Crozemarie est mis en examen dans l’affaire de l’ARC. Les donateurs deviennent plus méfiants, la question du « sur-sollicitation » devient plus préoccupante. Les fundraisers font un peu les frais de ce retournement de conjoncture et d’une certaine uniformisation des pratiques de marketing direct. L’exaltation se tempère, les méthodes se structurent. Pour marquer le tournant, en 1996, le Club des Fund-Raisers devient l’Union des Professionnels pour la Générosité (UPG), reflet d’une certaine institutionnalisation du métier, et de sa volonté de se positionner sur la générosité au sens large (collecte de dons, bénévolat), et non plus sur le seul « fundraising ». Un mot qui ne parle d’ailleurs pas à grand monde hors du secteur… 

L’ère de la diversification

En 2002, l’association, qui a un peu perdu en dynamisme, commence à se relancer, avec une ambition importante sur les questions de formation. Elle lance son Séminaire Francophone de la Collecte de Fonds et change à nouveau de nom en 2005 pour devenir l’Association Française des Fundraisers. Car en ce début de millénaire, le secteur a atteint une forme de maturité teintée d’un début de rigueur : les taux de croissance s’affaissent, les frais de collecte sont de plus en plus élevés. Alors que le don et le phénomène associatif se banalisent, l’ère du « tout-marketing direct » arrive un peu à son terme. La nécessité de se différencier ouvre la voie à des compétences en marketing stratégique – qui interrogent les associations sur leur marque, leur logo, leur territoire – et à de nouveaux outils et cibles, ainsi qu’au développement des compétences associées. Les enjeux se nouent autour de la montée en qualité de la relation donateur (mécénat, legs, grands donateurs) et du renouvellement des leviers de marketing direct (prélèvement automatique, street-fundraising, débuts de la collecte sur le web).

Dans ce contexte, les structures qui collectent réfléchissent aussi plus en profondeur au rôle du fundraisers dans des stratégies globales de développement. Ils deviennent plus diplômés, plus spécialisés, et l’AFF accompagne leur montée en compétences alors que le type et le nombre de structures collectant des fonds se multiplient également. Tandis que le social et la culture sont les grands champs historiques de l’appel à la générosité, de nouveaux secteurs s’ouvrent en effet, notamment par la création de véhicules dédiés (nouveaux types de fondations créés en 2008) : hôpitaux, écoles et universités, environnement, patrimoine… même le secteur public et les collectivités territoriales s’y mettent ! Autant de secteurs qui appellent à des rencontres dédiées : l’AFF crée ainsi des Conférences sectorielles (Enseignement Supérieur en 2005, Confessionnel en 2009, Culture en 2010, Collectivités en 2014).

Reconnaissance de métiers

En 2005, elle lance aussi, en partenariat avec l’ESSEC, le Certificat Français du Fundraising (CFF), première formation certifiante dédiée au développement des ressources. Son but : aider à professionnaliser la collecte de fonds et affinant les compétences des fundraisers, mais aussi accroître la reconnaissance de la profession. Car c’est l’autre pan du travail de l’AFF en fil d’Ariane : favoriser la reconnaissance de ses métiers restant tristement méconnus du grand public. Pour cela, elle réussit par exemple en 2011 à créer avec l’APEC le premier « Référentiel des métiers du fundraising ». En 2015, elle obtient l’enregistrement au RNCP du titre de Directeur ou Directrice de la collecte de fonds et du mécénat, le seul titre en lien avec le métier de fundraiser. Et pour faire infuser le développement des compétences des fundraisers partout en France, elle initie également – à partir de 2009 – des Groupes Régionaux. Outre l’animation de la communauté de métiers en région, ces groupes permettent aux professionnels d’adresser ensemble les spécificités de leurs territoires (typologie des entreprises locales vs sollicitation du mécénat par exemple). Ils sont aujourd’hui une dizaine.

Que de chemin parcouru avec vous en 30 ans ! Depuis notre création en 1991, les contextes de travail des fundraisers n’ont cessé d’évoluer : métiers, secteurs d’activité, cadres juridiques et fiscaux changent, etc. Et nous n’avons cessé de nous adapter, d’essayer d’anticiper, pour toujours mieux vous accompagner. Des ambitions encore renouvelée en 2019 dans le cadre de notre plan stratégique à horizon 2024 qui se déclinait en trois axes : approfondir notre accompagnement des fundraisers, faire résonner l’impact des fundraisers et développer la culture du don, consolider la communauté des fundraisers et développer l’entraide entre les membres… L’objectif ? Etre un acteur de mobilisation et d’engagement des fundraisers au service de l’intérêt général. Un passeport pour bien des années.