Pas encore vraiment sortie de l’urgence, Sophie Le Maire, Directrice du Développement de la Fondation AP-HP revient sur l’incroyable élan en faveur des équipes de l’AP-HP, et sur l’absorption de cette collecte inédite.

 

Comment a débuté la collecte de la Fondation AP-HP ?

Tout a commencé fin février. Nous regardions alors les choses en nous demandant avec quelques scrupules quelle serait la pertinence ou pas de collecter. C’est un grand donateur de la Fondation qui a impulsé les choses en nous disant qu’il souhaitait soutenir des projets de Recherche, mais ne voulait pas être seul à le faire. Avec les moyens du bord, car nous sommes une toute petite équipe, nous avons réalisé une vidéo et un appel par mailing à tous nos donateurs, juste avant le confinement. Nous étions donc un peu en avance, mais pas du tout préparés à ce qui a suivi : une collecte incroyable, avec des dons de toutes sortes et de tous les horizons. Et il y a encore des initiatives qui se lancent ! Nous avons fait en quelques semaines ce que chaque fundraiser rêve de faire sur une année – ou même plusieurs années – et innové avec nos donateurs en lançant un festival de street art confiné, en organisant des tournois FIFA en chambre tout en mobilisant les gamers sur Twitch ou en vendant aux enchères les baskets de Zidane ainsi que la raquette de Joe-Wilfried Tsonga… Nous avons aussi reçu de très grands dons, dont une contribution exceptionnelle d’Hermès de 20 millions. Nous nous sommes également engagés dans l’alliance avec la Fondation de France et l’Institut Pasteur pour unir nos forces dans la gestion de cette crise inédite.

 

C’est un peu votre Notre-Dame à vous ?

Oui, d’ailleurs nous avons été en contact avec les équipes de la Fondation du Patrimoine très tôt dans la crise et leurs conseils ont été très précieux. Comme pour eux, l’avantage a été une collecte essentiellement digitale pour les dons financiers… car nous n’avons pas géré les dons en nature à la fondation. Ce sont les équipes de l’AP-HP, dont les directeurs mécénat dans les hôpitaux, qui ont réceptionné, stocké et organisé la logistique des dons qui allaient de masques, aux crèmes pour les mains en passant par toutes les formes de nourritures. Ils ont dû créer des entrepôts d’urgence, notamment un dans la chapelle de la Pitié Salpêtrière ! De notre côté, nous avons eu l’appui de iRaiser, mobilisé à nos côtés, pour consolider notre formulaire de dons, mettre en place une plateforme de peer to peer pour mieux superviser les dizaines de cagnottes qui se montaient… Il y aussi microDon qui a été très engagé et nous a permis très rapidement de bénéficier des arrondis en caisse dans la grande distribution. C’est un outil vraiment très efficace de collecte comme de communication. L’agence Mindme nous a aussi accompagnés en probono dans le renforcement de notre présence digitale.  L’avantage de cette collecte globalement dématérialisée est d’être très automatisée et de permettre d’absorber rapidement énormément de dons. Il y a aussi eu des chèques évidemment, que nous avons littéralement géré « à la maison »…

 

Un premier bilan de cette collecte inédite ?

Plus de 40 000 donateurs se sont mobilisés en moins de deux mois à nos côtés ! Nous allons publier très prochainement les résultats qui dépassent toutes nos espérances… sans que nous ayons eu d’espérances précises d’ailleurs ! Et c’est difficile d’avoir du recul déjà sur cet élan incroyable en faveur des équipes de l’AP-HP. Car c’est indéniablement les soignants que les donateurs voulaient soutenir. D’ailleurs nous avons dû élargir le champ d’intervention de la fondation, qui est à la base une fondation dédiée à la recherche, pour pouvoir répondre à cet élan. C’était un des points de la loi d’urgence du 23 mars que de permettre aux fondations hospitalières de pouvoir collecter pour l’organisation des soins et non plus seulement pour la recherche. Je dirais qu’une des leçons d’une telle collecte est qu’il faut savoir garder la tête froide et rester vigilant. Ne pas accepter n’importe quoi. S’assurer que les engagements pourront être tenus conformément aux souhaits des donateurs et ne pas oublier qu’il faudra rendre des comptes. Et puis il y a évidemment la conscience de toutes les associations pour qui la période a extrêmement compliqué les choses. On y pense beaucoup, forcément, en espérant que la générosité dont on bénéficie ne se fait pas au détriment des autres…