L’aventure Web du mois de janvier ? Celle d’Eugène, un « œuf record du monde » qui a agité les réseaux sociaux pendant 4 semaines avant de révéler son contenu… Une cause et quelques enseignements digitaux.

Si vous êtes très actif sur les réseaux sociaux, vous savez probablement déjà tout d’Eugène. Pour les autres, voici son histoire. Lancé discrètement début janvier, le compte Instagram ne compte qu’une seule photo : la sienne. Un petit œuf mais un immense défi : avec cette photo élémentaire et sans but avoué, battre le record du monde du post Instagram le plus liké de l’histoire (détenu jusque-là par Kylie Jenner, star US de la téléréalité : 18 millions de Like pour la photo de naissance de son bébé).

Défi relevé ! Eugène le « world record egg« , atteint les 52 millions de Like et dix millions d’abonnés. Puis poste à un rythme lent mais régulier quelques photos de sa coquille en train de se fendiller. Quel poussin en sortira ? C’est l’affolement chez les marques pour récupérer cette audience aussi large que captive. Une audience digne de celle du Super Bowl (l’espace publicitaire TV vendu le plus cher aux USA et chaque année l’occasion de spots-événements). Et c’est justement lors du Super Bowl qu’Eugène promet de révéler ce qu’il cache, si tant est que le spectateur le regarde sur la chaine Web Hulu, heureuse gagnante de cette course à l’échalote, qui aurait – selon la rumeur – déboursé 10 millions de dollars pour cette exclusivité.

Pour sa grande révélation en 30 secondes (visionnable ici), Eugène se brise – littéralement – et s’explique : « récemment, j’ai commencé à craquer, la pression des réseaux sociaux commence à me toucher, si vous êtes vous aussi en difficulté, parlez-en à quelqu’un » avant d’inviter à consulter un site qui recense, pays par pays, les associations œuvrant pour la santé mentale. Derrière ce compte, non pas l’association Mental Health America, qui reprend très vite l’info et semble un temps être l’auteur de la campagne, mais un trio de jeunes publicitaires britanniques.

Soyons honnêtes, le trio était probablement plus motivé par le délire « si on battait un record avec un œuf » que par la cause, officiellement le sujet de la campagne dès le départ. Le choix de l’œuf est justifié par les protagonistes par une forme de quête d’universalité : « un œuf n’a ni sexe, ni race, ni religion. C’est juste un œuf« . Mais il n’est pas impossible que la cause soit venue au fil de l’expérience, avec le succès…

Pour la cause santé mentale, est-ce une réussite ou un échec ? La giga-audience a certainement été un brin sensibilisée. Les patients (en témoignent les commentaires sur Instagram) se sont quant à eux probablement sentis un peu sortis de la honte et de l’isolement par un tel buzz. Mais en termes de monétisation de cette audience, de potentiel d’appel au don… c’est un peu une occasion ratée. L’expérience montre quand même à nouveau qu’avec zéro budget et une bonne idée, les réseaux ont un pouvoir de mobilisation sans pareil. Et ils s’attachent de plus en plus à faciliter la collecte des associations : Instagram vient juste d’annoncer être en train de développer des boutons de dons pour ses posts et stories, à venir dans le courant de l’année.