Décidément, il y a quelque chose de pourri au royaume d’Angleterre. C’est un nouveau scandale qui secoue, depuis vendredi dernier, le monde des charities outre-Manche. Sauf que cette fois-ci, l’affaire risque d’avoir des répercussions planétaires sur l’ensemble des organisations faisant appel à la générosité du public. Après l’affaire Olive Cooke en 2015, puis l’affaire des hôtesses du gala de charité du Presidents Club au mois de janvier dernier, cette fois, c’est Oxfam qui s’illustre tristement sous les feux des projecteurs.

Le Time révèle ainsi que des humanitaires ont eu, aux frais de l’association, recours à des réseaux de prostitution, parfois de mineurs, lorsqu’ils étaient en poste en Haïti, peu après le tremblement de terre de 2010. Hier, le président haïtien n’a pas mâché ses mots : « Il n’y a rien de plus indigne et malhonnête qu’un prédateur sexuel qui utilise sa position dans le cadre de la réponse humanitaire à une catastrophe naturelle pour exploiter les personnes nécessiteuses dans leurs moments de grande vulnérabilité ». Et il n’y a pas qu’en Haïti : une ancienne responsable évoque aussi des viols au sud-Soudan.

Les démissions se sont succédé au sein de la branche britannique de l’ONG, notamment la directrice adjointe, qui a évoqué sa « honte ». Mais les répercussions risquent d’être terribles pour l’association : le secrétariat d’Etat au développement international britannique ainsi que la commission européenne ont d’ores et déjà menacé de lui couper les vivres. Quid des 5 000 salariés et des 108 millions de livres de dons annuels ?

Pire encore : l’ancienne secrétaire d’Etat au développement a affirmé, dimanche, que des affaires de pédophilie ne concerneraient pas qu’Oxfam. Mais « que 120 travailleurs humanitaires employés non seulement par Oxfam mais par Save the Children, Christian Aid et la Croix-Rouge britannique avaient été signalés par leur employeur pour des abus sexuels pendant la seule année passée », rapporte Le Monde. Une effroyable hypothèse, qui pourrait avoir pour conséquences d’éclabousser l’ensemble du tiers secteur et de ruiner la confiance des donateurs, également soutenue par un avocat, ancien travailleur de l’humanitaire, Andrew McLeod (lire ici).

Sans nul doute, l’affaire ne manquera pas d’ébranler la vingtaine d’ONG Oxfam présentes dans le monde. Depuis le week-end, Oxfam France a pris publiquement ses distances vis-à-vis de sa consoeur britannique. Samedi, l’ONG basée à Paris publiait sur son site une « réponse », visant à rassurer ses donateurs : « Nous espérons conserver la confiance de toutes les personnes avec qui nous travaillons ou qui nous soutiennent et qui savent, comme nous, que les actions de quelques individus ne reflètent pas ce qu’Oxfam défend avec force ». On ne peut qu’espérer que les donateurs sauront faire la part des choses, mais pour l’heure, rien n’est moins sûr.