A force d’initiatives et d’annonces généreuses, il y a de quoi perdre le compte. Mais pas pour le Center for Disaster Philanthropy américain et Candid (organisation non profit née en 2019 de la réunion du Foundation Center et de Guide Star, guide de référence des non profits outre-atlantique). Tout juste publié, leur rapport sur la philanthropie dédiée à la lutte contre la pandémie de Covid et ses effets sociaux a soigneusement compilé tous les grands dons (supérieurs à 50.000$) rendus publics entre mars et décembre derniers… pour un total colossal qui dépasse les 20 milliards de dollars ! Soit, pour donner un ordre de grandeur à ces chiffres presque désincarnés, le double des contributions philanthropiques des 10 grandes dernières crises cumulées… A noter que si ce rapport concerne officiellement la philanthropie mondiale, il recense surtout plus de 15 milliards donnés aux USA au travers de près de 25.000 dons, aucun don « digne de ce nom » (selon ses critères) n’ayant par exemple été recensé France.

En tête des donateurs en montants, les entreprises, qui ont contribué à 44% de cette somme (soit 9,4 millions de dollars), mais avec des bénéficiaires très concentrés puisqu’elles totalisent seulement 5% du nombre de dons réalisés. A elle seule, Google.org a donné 1,15 milliard de dollars au travers de 17 contributions philanthropiques. Second type de contributeurs, les grands philanthropes individuels avec 27% des montants, soit 5,8 milliards de dollars… dont 4 milliards donnés par la seule McKenzie Scott (ex épouse de Jeff Bezos, patron d’Amazon). Troisièmes sur le podium de la générosité, les fondations privées, avec 22% des dons, soit 4,7 milliards de dollars dont la moitié viennent de la Fondation Gates (1,3 milliard donnés au travers de 398 contributions) et de la Fondation Rockfeller (1,1 milliard, en 86 contributions). De leur côté, les community foundations ont joué à plein leur rôle territorial de soutien aux structures de terrain : 3% des montants donnés (soit tout de même 543 millions de dollars…) mais 54% du nombre des contributions (plus de 17.000 au total).
 
Point intéressant : ces contributions se sont peu à peu, au fil de la crise, libérées des habitudes de fléchage habituelles sur les projets pour apprendre à mieux soutenir les besoins des structures faisant elles aussi face à la crise : 39% des montants ont été donnés sans restriction (ils étaient 3% au premier point d’étape fait l’été dernier). Le fléchage ayant plutôt été sur l’orientation des structures que sur le type d’actions : 35% des dons explicitement affectés l’ont été aux communautés dites BIPOC (black, Indigenous and people of color), le contexte du regain de vitalité du mouvement Black Lives Matter aux USA. Ce mouvement de « libéralisation » du don a été pour beaucoup porté par les 4 milliards de McKenzie Bezos, entièrement donnés dans cette logique flexible. Reste, s’interroge le rapport, à savoir si ces soutiens, surtout sous cette forme, se poursuivront en 2021. Selon les 20 scénarios envisagés pour les USA – et face à un taux de défaillance des associations d’environ 4% par sans crise – le scenario médian envisage 11% de faillites associatives. Et le pire pourrait mener jusqu’à 38% de charities mettant la clé sous la porte.
 
Pour découvrir le rapport complet, c’est par ici.