3 questions à Juliette Démares
20 mars 2025

« Je suis une défricheuse de mécénat »
Chargée du mécénat et des partenariats entreprise à la Métropole Rouen Normandie, Juliette Démares est au fond surtout un catalyseur de mécénat territorial. Aiguillon parfois, pédagogue toujours, elle accompagne élus, communes, associations et entreprises de sa métropole dans la création d’un terreau commun, pour y planter ensemble de beaux projets !
Quel regard portez-vous sur l’évolution du mécénat ces dernières années ?
Depuis 17 ans que je fais ce métier dont sept ans à ce poste, il me semble d’abord que l’acceptabilité et la culture du mécénat ont progressé tant chez les élus, que dans les équipes des collectivités et les associations. Même s’il reste encore de nombreux aprioris. Dans les plus grandes entreprises, il y a eu une professionnalisation importante, qui se traduit souvent par le resserrement des champs de mécénat sur leurs axes de RSE et le développement de leurs fondations, pour la plupart à Paris. La conséquence pour le mécénat dans les territoires, c’est que les budgets mécénat des directions régionales sont de plus en plus contraints, et ont même, pour certains totalement disparu. Il faut donc désormais passer obligatoirement par les fondations, même pour de très modestes montants. Finalement, le temps et l’énergie nécessaires pour établir ces conventions font que cela ne vaut souvent pas le coup de les solliciter. Cela incite donc à réancrer ces soutiens et à se tourner plus vers les PME et TPE de son territoire, qui ont développé leur engagement ces dernières années et notamment sous forme de mécénat de compétence. Certaine crée même des fonds de dotation en local, ça veut dire qu’elles souhaitent s’impliquer dans le temps, c’est une bonne nouvelle !
En quoi consiste exactement votre poste dans une structure comme la métropole ?
Dès ma prise de poste, j’ai posé l’idée d’être un « pôle ressources » pour les projets culturels, environnementaux et solidaires en accompagnant les 71 communes de la métropole et les associations du territoire dans leurs démarches de mécénat. Je ne les incite pas, mais je réponds à leurs demandes : me solliciter cela prouve qu’ils ont envie de se lancer. C’est le prérequis nécessaire car ensuite il y a encore beaucoup à faire. D’abord de la réassurance et de la pédagogie. L’arrivée du mécénat dans une structure se prépare. Il faut former, aider à identifier le bon projet pour débuter, établir des outils (une charte éthique, une plaquette…), trouver les personnes à l’aise pour défendre le projet et cibler des entreprises … Je suis une sorte de consultante ! Je suis aussi là pour mettre toutes les parties prenantes autour de la table, pour poser sans détours les questions qui fâchent afin que, lorsque les premiers mécènes arrivent, tout se passe bien et que les éventuelles tensions aient été désamorcées. Je suis enfin une défricheuse de mécénat : chaque projet est une nouvelle excuse pour aller rencontrer des entreprises. Même si elles ne s’engagent pas sur le projet, j’aurai déblayé le terrain et les questionnements liés au mécénat pour qu’elles puissent ensuite être sollicitées par d‘autres !
Dans un contexte de baisse des subventions, pensez-vous que le rôle des collectivités pourrait s’étendre plus largement à cette mission de « catalyseur de mécénat » ?
Je ne crois pas que nous soyons beaucoup à jouer ce rôle de « pôle ressources » mais je sens que l’intérêt est croissant. J’ai de plus en plus de demandes, et effectivement, à défaut de donner une subvention, nous pouvons proposer cet accompagnement, les élus l’ont bien compris. Mais aujourd’hui, il y a encore des caps à passer ne serait-ce que pour que les collectivités collectent pour leur projets.
Nous constatons entre nous, au sein du Club Collectivités de l’AFF, sans vouloir politiser le mécénat, que selon les sensibilités des élus, des oppositions, les démarches de mécénat trouvent un terrain plus ou moins favorable. C’est toujours un plus quand les Maires et leur cabinet sont partants pour s’impliquer. Ils connaissent les entreprises de leur territoire et peuvent ainsi les embarquer plus facilement. Du côté des médias locaux, on sent qu’ils sont plus enclins à partager les belles histoires qui se créent dans le cadre du mécénat. Ils ont compris qu’il s’agissait de coopération, mobilisation collective, soutien de projet d’intérêt général et dans le contexte, ces belles histoires font du bien !
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