Leçon d’engagement (by Nike?)
12 septembre 2018
La question de l’engagement des jeunes revient régulièrement sur le tapis, et taraude nombre de fundraisers en quête de la clé d’entrée pour les mobiliser. Si vous vous questionnez sur le sujet, une étude et une campagne – signée Nike – peuvent cette semaine nourrir vos réflexions.
Pour un jeune, la citoyenneté, c’est le bénévolat. C’est presque ainsi que pourrait se résumer la très sérieuse étude du Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco) qui passe en revue les pratiques d’engagement de 6.600 élèves de Terminale. Une première plongée dans les leviers qui les mobilisent avant un rapport plus complet en Novembre (16.000 collégiens et lycéens interrogés au total).
Ses résultats confirment un certain nombre d’autres études, notamment sur le désintérêt (plus marqué que chez les autres jeunes européens) pour le système politique et ses partis, qui ne sont pas pour eux un territoire adéquat de confiance, donc d’engagement : un quart n’a que peu ou pas confiance dans le système démocratique, 87% n’ont pas ou peu confiance dans les partis politiques et 78 % dans le gouvernement. Une défiance qui s’étend aux mouvements syndicaux qui n’attirent qu’un petit tiers des lycéens mais n’impacte pas l’importance accordée au vote : 88 % des lycéens de Terminale prévoient de voter aux élections nationales, 80 % aux élections locales et 66 % aux européennes.
Face à ces constats, et alors que l’école ne leur propose que peu de voies pour s’engager au-delà des fonctions de délégués de classe, c’est vers l’engagement de type associatif que les lycéens se tournent et particulièrement vers le bénévolat : 44 % des sondés affirment être engagés dans une association humanitaire ou environnementale (et près des trois quarts pensent qu’ils le seront à l’âge adulte). Ils se tournent également vers des « engagements revendicatifs ponctuels » : signer une pétition (71%), manifester (62%) ou boycotter des produits (68%). Finalement, 96% d’entre eux envisagent de s’engager d’une manière ou d’une AUTRE dans la vie citoyenne.
Qu’est-ce que s’engager ?
Mais qu’est-ce que s’engager ? En avril dernier, une autre étude, signée de l’AFEV, réseau d’étudiants solidaires intervenant dans les quartiers populaires, venait préciser les contours du concept. Pour les 1000 jeunes de 15 à 30 ans interrogés, l’engagement était avant tout « s’impliquer réellement et avec conviction dans ce que l’on entreprend » (31%), mais aussi « faire une promesse et tenir parole » (20%), avant la notion de « solidarité : aider les autres, donner son temps ou servir » (19%). Et paradoxalement, si 71% se sentent engagés, ils sont 52% à penser que leur génération ne l’est pas… Un effet de masse à créer donc et des postures à méditer pour qui cherche aujourd’hui à les engager.
De cette étude, sortent aussi 4 profils types de l’engagement jeune : le Volontaire (45% des sondés), le Bénévole (31%), l’Engagé (19%) et le Militant (5%). Des profils qui laissent transparaître des valeurs associées à l’engagement qui parlent plus de liberté que de responsabilité. De besoin de sens, de reconnaissance et d’épanouissement que de défense d’une cause ou d’idées.
Alors comment aller les chercher ? La leçon de la semaine pourrait bien venir de Nike et de sa dernière campagne. Trente ans après la création de son slogan Just Do It, la marque a en effet choisi de lancer une campagne aux accents profondément sociétaux mettant en scène sportifs engagés, différents, handicapé ou queer. En porte-parole : le joueur de football américain Colin Kaepernick, qui s’est rendu célèbre en 2016 (et s’est fait exclure depuis de la NFL, ligue de football américain) pour s’être mis un genou à terre pendant l’hymne national précédant les matches afin de dénoncer les violences policières à l’encontre des Noirs aux USA. Deux minutes posées avec une intention ultra-aspirationnelle qui invitent au dépassement de soi, non pas tant sportif, qu’humain en clamant « Believe in something, even if it means sacrificing everything » avant de se conclure par le slogan « Don’t ask if your dreams are crazy. Ask if they’re crazy enough« .
Politique, différemment
A quoi ca sert ? A mobiliser une audience jeune justement. Avec tout sauf du consensus mou derrière la campagne presque « facile » de bons sentiments (vue depuis ce côté de l’Atlantique). Éminemment politique – on ne plaisante pas avec l’hymne national aux USA – le spot fait s’enflammer les réseaux sociaux de consommateurs brulant leur paire de baskets (et de la colère de Donald Trump himself). L’action dévisse de 3% avant de remonter. Les ventes se seraient envolées de 30% depuis rapporte le Figaro. Et surtout, Nike s’est probablement offert, à la volée de ce buzz colossal, une bonne dose de loyauté de la part de ses cibles jeunes. Une loyauté fondée sur son propre engagement.
Les leçons à tirer de cette campagne qui pourrait presque être signée d’une association de défense des Droits de l’Homme ? C’est peut-être que pour générer de l’engagement – bénévole certes mais aussi financier à plus ou moins long terme – auprès de cette cible, il faut commencer par s’engager soi-même et admettre qu’on ne peut pas plaire à tout le monde. A se réapproprier son rôle politique, si ce n’est dans la politique. C’est peut-être qu’il faut regarder au-delà du secteur non marchand, alors que se glisse partout la notion d’engagement (pour la planète, pour des valeurs plus humaines, etc.) afin de se réapproprier des codes plus en phase et émerger avec puissance. C’est surement d’apprendre à valoriser plus, mieux – ou différemment – ceux qui s’engagent déjà auprès de sa cause.
Pour aller plus loin :
- Etude du Cnesco sur l’engagement citoyen des lycéens à télécharger ici.
- Observatoire de l’engagement des jeunes de l’AFEV à télécharger là.
- Campagne Dream Crazy de Nike à visionner ici.
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