QUELS IMPACT DE LA TECH SUR LA GÉNÉROSITÉ À 10 ANS ?
5 juin 2019
Algorithmes prédictifs, agents conversationnels, gaming ou réalité virtuelle… Comment le don sera-t-il impacté par les technologies émergentes ? À quoi ressemblera le fundraising en 2030 ? Rhodri Davies, du think tank Giving Thought, présentait le 24 mai, lors de la Fundraising Week du magazine Third Sector, ses réponses au sujet.
Au cœur de l’intervention de Rhodri Davies, Head of Policy et Program Director du think tank britannique Giving Thought : la question de l’impact de la technologie sur la collecte de fonds d’ici 10 ans. Un impact qu’il prévoit global, et qui changera à la fois OÙ, COMMENT et CE QUE nous donnons. Parmi les premières évolutions qu’il souligne, la désintermédiation, les plateformes (for profit ou non profit) : crowdfunding et cagnottes, mais aussi Facebook, Instagram et autres Airbnb (qui a récemment intégré une fonctionnalité don pour permettre aux loueurs d’abandonner une partie de leurs recettes, voir cet article de Clubic). Une plateformisation qui rencontre celle des mouvements décentralisés (de Black Lives Matter aux USA aux Gilets jaunes en France). Et cette évolution vers des modes relationnels désintermédiés déjà à l’œuvre – des USA à la Chine en passant par l’Europe – n’en est qu’à ses débuts de la transformation du lien causes – soutiens.
En lien avec ces nouvelles manières de donner, et de collecter, il souligne aussi le gaming solidaire comme une tendance appelée à se développer. Là encore, même si la tendance reste mineure aujourd’hui, les signaux faibles vont déjà croissants, des 1M€ de collecte de l’événement de gamers Zevent en novembre dernier en France (voir notre article ici) aux 3M$ donnés à l’association au choix du vainqueur du premier tournoi Fortnite à Los Angeles l’été dernier (voir ici l’article du Guardian… et si vous ne savez pas ce qu’est ce jeu en ligne – le plus populaire au monde – demandez à vos enfants). Ce que l’on donne devrait aussi évoluer. Alors que les data sont déjà fréquemment évoquées comme le « pétrole du 21ème siècle », et que la planète s’agite autour des questions de leur monétisation et de leur propriété, les dons en « actifs digitaux » devraient fleurir : cryptomonnaies certes, mais pourquoi pas aussi des « vies » de jeu vidéo justement, ou tout autre actif digital.
Évidemment l’Intelligence Artificielle est au cœur de son exercice prospectif. D’abord avec les algorithmes conversationnels, voire les robot-conseillers philanthropiques. Nous n’en sommes qu’au début, mais chaque semaine apporte une nouvelle initiative. En ligne, comme l’association 30 Millions d’Amis qui vient tout juste de digitaliser sa campagne estivale de lutte contre l’abandon et propose un chatbot (version minou ou version toutou) pour apporter des conseils aux propriétaires via la plateforme www.nosvacancesentreamis.com. Mais aussi par téléphone : les plateformes conversationnelles via message texte dédiées au CRM se développent, et elles devraient de plus en plus embrasser au passage les problématiques associatives (voir le récent lancement de la plateforme Engage au UK, sur le site Fundraising.co.uk).
Mais la conversation s’engagera aussi massivement – et à haute voix – dans nos cuisines, nos chambres et nos salons, via les enceintes connectées. Alexa, l’enceinte d’Amazon, a ouvert la possibilité de faire des dons à la voix depuis un an. Et elle diversifie les possibilités depuis. En novembre, pour Giving Tuesday, elle rendait possible l’achat et l’expédition directe par Amazon d’un jouet pour l’association Toys for Tots (de deux jouets en fait puisque l’entreprise s’engageait à abonder chaque don). Le 24 mai, pour le Red Nose Day américain (proche de nos « nez rouges »), un pas de plus était franchi. Il ne s’agissait plus de permettre de donner à qui le voulait, mais d’inciter à donner. À l’adresse « Bonjour Alexa », l’enceinte répondait automatiquement « mon cercle lumineux est peut-être bleu, mais aujourd’hui je pense rouge, en soutien au Red Nose Day… » (plus d’infos dans l’article de Fast Company).
Pour ce qui est des algorithmes prédictifs, Rhodri Davies est clair : nous suivons déjà leurs conseils pour choisir nos musiques, nos vidéos ou nos lectures… pourquoi pas pour notre générosité ? Il prévoit même une possible hyper-rationalisation du don via les « philgorithmes »: des algorithmes qui identifient les besoins sociétaux les plus pressants à un moment donné ainsi que les leviers d’intervention les plus efficaces pour les adresser… avant d’effectuer un don automatique ajustant « offre » et « demande » ! Sans présumer que la générosité sera dénuée d’affect d’ici dix ans, force est de constater que les algorithmes commencent déjà à se frayer un chemin dans nos métiers. Le site Fundraising.co.uk rapportait justement ce lundi l’initiative de Futurus Groupe, qui a créé l’algorithme « Gratitude to Give » pour le secteur hospitalier. Un outil qui serait capable de donner à un patient un score de gratitude (sur la base de données de l’hôpital et de données tierces)… et donc de mesurer son potentiel à devenir ou pas donateur…
Pour télécharger les slides de la présentation de Rhodri Davies (Giving Toughts, think tank de la Charities Aid Foundation), c’est par là.
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