La crise du coronavirus a vu émerger pléthore de nouveaux hashtags solidaires. Parmi eux, #ProtègeTonSoignant qui de chansons en cagnotte, de réseaux sociaux en écrans de pub TV (avec un spot signé BETC), d’influenceurs en people, notamment via la tombola Stars Solidaires, a réussi à rassembler 7 millions d’euros essentiellement destinés à l’achat de matériel médical. Mais qui se cache derrière cette nouvelle marque collectrice, devenue en très peu de temps une incontournable de la lutte contre le Covid-19 ? Le point avec Arnaud de La Taille, cofondateur d’AssoConnect et Trésorier de Tech For Good France, qui propose aussi son regard sur la digitalisation du secteur associatif.

 

Comment est né Protège Ton Soignant ?

Le collectif émane d’un groupe de médecins et d’entrepreneurs plutôt issus de la Tech, et notamment de la Tech For Good, mais pas seulement. Face aux besoins des hôpitaux au début de la crise, et sans prétendre remplacer la réponse étatique – massive mais donc relativement lente à mettre en œuvre – il nous a semblé que notre culture de l’agilité, nos réseaux, pouvaient nous aider à livrer rapidement du matériel médical aux hôpitaux. C’est un vrai collectif, sans dirigeant, je veux le souligner, même si derrière il y a effectivement l’association Tech For Good France qui a servi de véhicule notamment pour absorber les dons. Les choses se sont construites avec pour seuls mots d’ordres : simplicité, rapidité et transparence puisque nous publions l’intégralité des commandes de matériel sur notre site. Le collectif a en fait fonctionné avec les méthodes de gestion de projet digital : commencer petit, évaluer, améliorer, itérer…

 

Parti de zéro, vous avez réussi à vous imposer comme un acteur incontournable de la réponse, et de la collecte…

Le nom parlait de lui-même… et cela a en effet été très vite. Nous avons commencé avec un petit groupe d’une quinzaine de personnes, et fini avec une mobilisation extrêmement large : 30 personnes dédiées au pôle sourcing de matériel par exemple, ou une trentaine d’autres mobilisées sur l’organisation de la tombola Stars Solidaires, mais aussi du mécénat de compétence d’avocats, de fiscalistes, d’experts comptables, de communicants…Cela nous a permis de collecter un peu plus de 7 millions d’euros (sur lesquels nous avons déjà commandé pour plus de 6 millions de matériel), dont 1,5M€ en 15 jours sur la tombola Stars Solidaire qui a rassemblé 190 lots et 60.000 participants. Il y a aussi eu de nombreuses initiatives pour nous soutenir : des ventes caritatives, des tournois de e-sport, des grands donateurs et mécènes…

 

Est-ce que l’opération est vouée à se clore ?

Au départ, cela n’était pas destiné à devenir pérenne. Je ne pensais pas que cela prendrait cette ampleur. Même si tout s’est très bien passé in fine, en tant que trésorier de Tech For Good France, il y a eu un moment où je n’étais pas totalement serein que tout aille si vite ! Si la collecte va se clore dans les prochains jours, l’élan qu’elle a créé fait que nous nous interrogeons maintenant sur les éventuelles pistes pour la suite.

 

Comment se sont passées les choses pour AssoConnect ?

Sur ce projet, l’équipe s’est surtout mobilisée pour la tombola Stars Solidaires. Après cette plongée en profondeur dans le sujet, je crois que ce format est voué à se développer en France. Même si la première fois c’est un peu un enfer en ce qui concerne la gestion des contraintes techniques et réglementaires, et les méandres administratifs liés aux jeux d’argent ! Mais une fois qu’on a le mode d’emploi, c’est vraiment un outil très intéressant. Certes ici, le contexte a beaucoup aidé à la réussite, comme le fait que nous avons rapidement eu des lots vraiment attractifs, du maillot de Zidane au disque d’or de David Guetta. Concernant notre activité principale, il y a eu un ralentissement du nombre d’inscriptions des petites et moyennes associations à nos services pendant le confinement, mais ils se sont poursuivis. Sur les plus grosses structures, on constate plus d’attentisme et de report des décisions d’investissement.

 

Le confinement n’a donc pas pour l’instant généré de transition digitale à marche forcée ?

Pas forcément pendant le confinement mais nous constatons en revanche une forte augmentation des demandes liées au paiement en ligne depuis le début du déconfinement. Il est très possible que le mouvement d’adoption d’outils digitaux s’accélère dans les mois à venir. Il y a encore beaucoup de chemin à parcourir. Des structures type fédérations par exemple peuvent avoir plusieurs millions d’euros de budget mais des fonctionnements très artisanaux, et aucun système d’information alors qu’elles doivent gérer nombre d’antennes locales. Pour nous au final, le sujet de complexité est d’essayer d’anticiper l’ampleur et les ramifications de cette crise et de voir comment nous restructurer au mieux pour répondre à l’évolution des enjeux.