Florence Le Mouël, Responsable des relations avec les entreprises à LUMA Arles répond à 3 questions au sujet des enjeux du mécénat dans la culture entre hybridation, territoires et fidélisation. 

Quel regard portez-vous sur l’évolution des enjeux de mécénat dans la culture ces dernières années ? 

Je travaille depuis une quinzaine d’années dans le domaine de l’engagement. Je suis passée par de grandes institutions – la Biennale d’art contemporain de Montréal, le Centre Pompidou ou encore le Louvre – mais aussi par des projets plus ancrés dans des dynamiques territoriales : le FRAC Aquitaine, je fus administratrice d’une association pour la création contemporaine à Toulouse. Au fil de ce parcours, j’ai constaté un besoin croissant de développer des modèles de développement plus hybrides et des approches plus variées du mécénat et du développement de la relation partenaires dans la culture. J’ai travaillé quelques années aux partenariats de la Fondation pour la Nature et l’Homme. Cette expérience avait été assez révélatrice. Alors que la culture restait souvent ancrée dans les enjeux de communication et de relations publiques, les organisations environnementales me semblaient plus en lien avec des directions cœur de métier : RSE, RH, Gouvernance… Les choses évoluent, notamment avec le rapprochement entre enjeux RSE & Mécénat et le besoin croissant des entreprises à favoriser l’engagement et la mobilisation interne. Une opportunité pour les organisations culturelles est de réaffirmer en quoi nos causes, nos atouts et nos ressources sont intrinsèquement des leviers d’engagement forts et de réussir à valoriser notre ADN culturel et artistique en réponse aux enjeux des entreprises.

Le besoin d’ancrage territorial est un de ces enjeux, est-ce que cela ne crée pas une forte compétition entre les structures appelant au mécénat sur un territoire ? 

C’est l’une des choses qui m’a convaincue de rejoindre LUMA Arles : un projet avec à la fois une dimension internationale et s’inscrivant par essence dans des enjeux territoriaux forts. En tant que campus créatif de 11 hectares à la fois lieu d’expérimentation, d’exposition, parc paysager ouvert sur la ville, intégrant un laboratoire de design et de recherche axé sur l’utilisation des ressources naturelles de la région nous sommes un lieu d’échanges et de rencontres partie prenante des transitions à l’échelle du territoire. C’est un levier fort d’adhésion vis-à-vis des entreprises, que ce soit parce qu’elles s’installent à Arles en souhaitent s’inscrire dans ces dynamiques, qu’elles aient des enjeux de recrutement ou de fidélisation de salariés… Quant à la question de la « compétition », le Sud de la France est un territoire très étendu et diversifié, il y a vraiment de la place pour tout le monde, chacun avec son identité. Quel que soit le territoire sur lequel j’ai été amené à travailler, je trouve d’ailleurs que les échanges avec mes homologues ont toujours été très constructifs, notamment au travers des groupes régionaux de l’AFF. Je garde un excellent souvenir des opérations menées à Bordeaux notamment dans le domaine de la philanthropie à l’époque.

Vous coanimerez une session sur les contreparties lors de la prochaine Conférence culture et collectivités de l’AFF*, en quoi le sujet est-il fondamental ? 

L’intervention abordera la question des contreparties innovantes, particulièrement dans une optique de fidélisation  et d’engagement des mécènes. Comment leur donner envie d’aller plus loin, comment les engager dans la durée ? Comment faire que nos programmes et contenus soient toujours plus accessibles et permettent de toucher les communautés autour de nos partenaires. Nous sommes jeunes, puisque le site LUMA Arles a fini d’ouvrir en 2021, nous avons cette possibilité de pouvoir expérimenter et tester de nouveaux modèles dans une perspective de long terme. Le contexte actuel est très tendu, économiquement, politiquement… On parle beaucoup des baisses de subventions mais, dans ce contexte, les entreprises ont aussi des raisons de resserrer aussi leur engagement, de s’interroger sur les causes prioritaires qu’elles souhaitent soutenir. A nous d’être en réflexion continue sur ce que nous pouvons leur apporter en tant qu’organisations culturelles pour répondre à leurs enjeux de RSE, d’attractivité RH, d’ancrage territorial ou autres. L’art et de la création sont des leviers forts pour amener les entreprises à faire un pas de côté pour aborder autrement et durablement leurs enjeux, à nous en tant que professionnel de faire ce trait d’union et de les embarquer !

* Retrouvez l’intervention de Florence Le Mouël et échangez avec les fundraisers de la culture lors de la conférence Culture et collectivités des 13 et 14 novembre 2025. Toutes les informations ici

Interview issue de la Newsletter du 25 septembre 2025. Pour découvrir toutes les prochaines interview de fundraisers et vous inspirer de leurs expériences, abonnez-vous à la Newsletter qui parait toutes les deux semaines !